mardi 16 février 2010

Dossier : Des séries françaises - Partie III

III - Imagine nation.

Nous sommes en 1999 après Jésus-Christ ; toutes les télévisions françaises sont occupées par des séries pitoyables... Toutes ? Non ! Car sur France 2, une série, adaptation française d'une série québécoise, va (enfin) pousser les chaînes à faire preuve d'un minimum d'imagination. Son nom : Un gars, une fille.


A) La "Shortcom".

Dés sa sortie, cette série à format court retraçant la vie d'un couple simple et ordinaire va exploser et être suivie quotidiennement par environ 5 millions de personnes. La recette est simple : des tranches de vie auxquelles tout le monde peut d'identifier, de bons acteurs (irrésistibles Dujardin et Lamy), une forte alchimie et un humour très bien calibrée.
Contrairement à H, la (très bonne) série humoristique au trio de stars (Debbouze/Eric/Ramzy) sortie l'année précédente, mais qui eut peu de répercussions, Un gars, une fille bouleversera le paysage télévisuel français en lançant la mode des "mini fictions" passant du bon (Caméra Café) au désastreux (Samantha, Oups !). Même Alain Chabat s'y lancera avec la production de la (très courte) série de Pierre-Alain Bloch, Avez-vous déjà vu..? .

Suivant ce principe, Alexandre Astier lance sa série comiquo-historique intitulée Kaamelott qui aura elle aussi un franc succès (près de 5 millions de téléspectateurs quotidiens, 5,6 pour sa quatrième saison). Mais Astier a une plus grande ambition pour sa série que 3 minutes 30 par épisodes. Ainsi, tout au long de ses six saisons, la série ne cessera d'évoluer pour devenir non seulement l'une des séries les plus drôles de France mais en plus une véritable fresque mêlant passion, loyauté, trahison et bras cassés. En effet, la série, pour trouver son rythme et sa forme parfaite, se doit selon Astier de changer de format (les épisodes passeront en 7 minutes puis prime time de 40 minutes, à l'américaine) mais aussi d'ambiance, devenant peu à peu une véritable comédie dramatique, la réalisation et l'interprétation se perfectionnant au fil des saisons ; il n'est donc pas rare de sentir son coeur se serrer, trépigner d'impatience et rire à larmes en moins de cinq minutes. La suite se déroulera au cinéma, pour (peut être) une trilogie de long métrages si les (nombreux) fans suivent.

De nos jours, quelques séries tentent de persévérer dans le domaine de la shortcom. Ainsi, M6 a réussit son pari en sortant la version moderne et tout âge (plusieurs générations cohabitent dans la série) d'Un gars, une fille avec la très bonne Scènes de ménages en exploitant, en outre, l'effet de famille, puisque l'une des actrices principales est la soeur cadette d'Alexandra Lamy. Cependant, tout les "remakes ne sont pas bon à prendre, car la diffusion de Caméra Café 2, annoncé comme le blockbuster de l'humour depuis un petit moment déjà, a réalisé une audience pitoyable et méritée, obligeant M6 à se réfugier dans la rediffusion de UG,UF...

Notons aussi, pour finir, le cas Nolife, une chaîne qui, comme son nom l'indique, sent bon la déconne, le jeu vidéo et la vieille pizza. A l'origine basée sur le même principe que sa concurrente Game One, en plus fun (les délirants et désormais célèbres Davy Mourier et Monsieur Poulpe - cela ne s'invente pas), elle ne semblait pas se destiner à être le foyer de plusieurs séries des plus inventives et fraîches.
Depuis 2007, l'unique et particulière NerdZ, créée, réalisée et interprétée par Mourier, Poulpe et Didier Richard, met ainsi en scène DarkAngel64 ("Dark" pour les intimes), un nolife de 24 ans qui, pour vivre, sous loue son appartement à Caroline, étudiante en fac de psycho, et Jérôme, maquettiste pour un magazine d'art contemporain, tandis que son ami Régis-Robert, un attardé mental, squatte chez lui...
Fort du succès de sa première série, la chaine lance alors en 2008 deux nouvelles séries, toute aussi originale que drôle : Flander's Company et Noob.
La première met en scène les employés et le PDG d'une boîte où viennent se présenter tous les super vilains les plus mauvais de l'univers afin de devenir génies du mal. La seconde se déroule dans le monde virtuel d'Horizon 1.0, un MMORPG (jeu de rôle en ligne dont l'exemple le plus connu est World of Warcraft), où Gaea se voit obliger, vu son bas niveau, à faire équipe avec plusieurs bras cassés de la guilde Noob si elle veut profiter des divers donjons.
Toutes ces séries, à défaut d'être universellement accessibles (les private jokes, les références aux jeux vidéos, l'humour douteux mais revendiqué, les acteurs délibérément amateurs), a le mérite de vouloir faire du neuf, d'être en phase avec leur public et de montrer que l'originalité se doit de supplanter la routine.


B) Le renouveau du format long ?

La série a format long a elle aussi bien évoluée. Ainsi, même si le thème n'a rien de révolutionnaire (la comparaison entre deux familles et leur éducation), la série de Anne Giaferi et Thierry Bizot, Fais pas ci, fais pas ça, propose toute une galerie de personnages plus hilarants les uns que les autres, avec, en tête, les excellents Valérie Bonneton et l'ex Nous c'est nous (et donc ami de Dujardin), Bruno Salomone. Abandonnant un concept intéressant (la fausse télé réalité) mais qui au final s'avérait pesant, la série est revenu à une narration plus simple et plus fluide (sans les intermèdes qui l'alourdissaient, par exemple) avec un format de 52 minutes, idéal pour un prime sur France 2 (surtout depuis la suppression de la publicité).

Toujours dans l'humour, après les déboires de la mitigée Off Prime, Simon Astier dévoile en 2008 Hero Corp, s'impose déjà, à la fin de sa deuxième saison, comme une grande série. En effet, le demi-frère du Roi Arthur (à qui il se permet de voler quelques fans) interprète John, un jeune homme qui se rend dans un village de la Lozère pour les funérailles de sa tante. En réalité, il s'agit d'une machination car, selon certaines visions, il est l'élu capable de mener d'anciens super héros vieillissant et aux pouvoirs pourrissant à la victoire contre les forces de The Lord.
Autour de cette idée géniale, Astier construit un véritable univers peuplé de héros incroyablement mauvais et délirants (Captain Shampoing, capable de projeter du shampoing avec les mains, Mental, capable de vous obliger à faire tout ce qu'il veut mais seulement si vous le décidez, etc.), de loups garous et autres vampires monstrueusement drôles. De plus, on peut dénicher dans le scénario, au delà de la simple comédie, une réflexion sur le couple, l'héroïsme, la trahison et la foi (si, si). Et même si les acteurs ne sont pas tous exemplaires (pas de balance ici), la réalisation (superbe pour une première oeuvre), la construction dramatique (des cliffhanger et des révélations surprenants pour une série française, à l'image de Lost), les guest stars de choix (le clan Astier, Bénureau, Lambert, Courtemanche...) et les divers hommages (Heroes, les comics, les films de séries B, la culture francophone assumée et sublimée, et même Kaamelott) parviennent vite à faire oublier ce léger détail.

Dans un tout autre domaine, Canal + semble s'être fait le porte parole de la fiction intelligente, adulte et sombre avec, dernièrement, Pigalle, la nuit de Hadmar et Herpoux (que je n'ai pas vu mais qui s'annonce prometteur, et, du moins, originale) et surtout Braquo menée d'une main de maître par Olivier Marchal (le revoilà lui ?!), un The Shield-like ambiance 36 Quai des Orfèvres, sinon réaliste, du moins couillu, anti manichéen et aux qualités indéniables (acteurs, réalisation, scénarios), faisant oublier l'ambiance croissant-saucisson de la P.J. .

*S.M.*

6 commentaires:

Flow a dit…

J'ai parcouru le dossier, synthèse intéressante mais je pense qu'il faut s'intéresser un peu plus à canal + (sans jeu de mots).
En effet, la révolution est là et elle a débuté avec la magnifique Engrenage, de loin la meilleure...

Sébastien Minnebo a dit…

Ah, au temps pour moi, je ne connais Engrenage que de nom, je l'ai donc oublié.
Quand à Canal +, la révolution se poursuit en effet avec ses créations originales, de véritables bombes télévisées.

Flow a dit…

C'est certain!
Heureusement qu'ils font contrepoids à TF1...
Pour Engrenage, je ne peux que te la conseiller
Sinon pour rigoler un peu, je me suis souvenu d'un autre remake de TF1 qui vaut le détour: Profilage une vraie ode à la nullité. :)

Sébastien Minnebo a dit…

Ah TF1 et ses remakes... Peut être feront ils un jour un remake de Oz, politiquement et moralement correct ?! Espérons, simplement pour rire un peu !

Flow a dit…

... :)
Perso j'attends ceux de Heroes et de Prison Break avec impatience...

Sébastien Minnebo a dit…

Et bah Heroes il y en a un peu dans Hero Corp, enfin juste un peu quoi ^^

Enfin bref, je ne sais pas ce qui leur a pris franchement...