mardi 2 mars 2010

Shutter Island : une histoire de fous.



Le film étant basée sur un twist final (une révélation inattendue), il est peut être préférable d'avoir vu le film avant de lire cet article.

Il est amusant de voir qu'un réalisateur adulé comme l'est Martin Scorsese a pu être fortement critiqué ces dernières années, que ce soit par les critiques ou les fans, et notamment depuis sa rencontre avec sa nouvelle muse, Leonardo DiCaprio. En ce début de 2010, tout le monde a donc les yeux rivés sur la nouvelle collaboration du réalisateur de Taxi Driver et l'ex Jack de Titanic, ici dans l'adaptation du best seller de Dennis Lehanne (2003), déjà connu pour les romans à l'origine des films Mystic River et Gone Baby Gone.

En 1954, à la suite de la disparition mystérieuse d'une patiente, les deux US marshalls Teddy Daniels et Chuck Aule débarque sur l'île de Shutter Island, au large de Boston, transformée en gigantesque asile psychiatrique pour dangereux criminels. Cependant, au fur et à mesure de l'enquête, Daniels découvre la vérité derrière les apparences.

Dés les premières minutes baignant dans une gris terne et froid, plan centré sur son nouvel acteur fétiche en train de vomir, Scorsese met les cartes sur tables : Shutter Island sera sombre, très sombre, et bousculera le spectateur et la star.
En effet, l'acteur semble totalement débrider son talent et nous livre ainsi, jusqu'à la dernière minute, une prestation magistrale, qui nous glace le sang. "Leo" quitte enfin son image de jeune éphèbe pour devenir un acteur charismatique et torturé (cf le dernier flash, prodigieusement mis en scène et interprété, incontestablement LA scène du film). Cette interprétation hors du commun éclipse un peu celle des autres stars qui sont pourtant toutes excellentes, de Mark Ruffalo, tout en finesse, à Ben Kingsley, parfaitement intriguant, en passant par Michelle Williams, envoutante.

Autour de ces rôles parfaitement joués, Scorsese s'essaye au film de genre et crée une atmosphère magnifiquement lourde, tendue et effrayante (la séquence de l'aile C et sa boîte d'allumettes), le décor magnifique de l'île lui aussi y jouant une grande part. Le cinéaste semble ainsi s'amuser comme un petit fou lorsqu'il s'agit d'étouffer ses personnages et ses spectateurs dans un univers où tout semble fermé : la tempête, l'île, le destin des personnages. Même la pluie leur barre littéralement la route.
Mais l'ambiance du film ne serait rien sans le travail remarquable sur la musique (il n'existe pas de musique originale pour le film) de Robbie Robertson, proche d'un Bernard Herrmann en grande forme période Psycho (la comparaison n'est peut être pas fortuite).

Scorsese a en outre du s'attaquer au problème du twist final utilisant brillamment les nombreux détails scénaristiques et de mise en scène (faux raccords, plan centré sur certains détails) à ces fins. Il est alors peut être assez décevant que le spectateur attentif découvre la vérité au bout d'une demie heure, d'autant plus que tout le film repose sur cette révélation (au contraire d'un film comme Incassable), révélation laissant par ailleurs un goût de déjà vu. Cependant, une grande partie du plaisir découlera ainsi d'une réflexion à propos des nombreux détails parcourant l'oeuvre.



En résumé : Collaborant une nouvelle fois avec Leonardo DiCaprio, devenu un acteur complexe et talentueux, Martin Scorsese retrouve la route vers la gloire d'antant avec cette réalisation quasi parfaite, emprunt d'une atmosphère réellement étouffante. Cependant la révélation finale s'avère peut être un peu trop réchauffée et prévisible.
***
" We gotta get off this rock, Chuck. "
Teddy Daniels (Leonardo DiCaprio)
*S.M.*

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